Ce n’était qu’un jour comme un autre. Rien n’avait prédit ce qui allait arriver. Même pas elle, allongée à plat ventre sur son lit, sifflotant en rythme avec sa musique, les jambes relevées en l’air battant le rythme. Adolescente, enfant. Elle était jeune, heureuse. Elle, fille unique. Son père entrain de préparer le diner. Unique parents, unique amour. Sa mère ? Une personne étrangère qui l’avait mise au monde avant de s’éloigner, de tout quitter. Elle ne savait ni son nom, ni son visage. Elle n’avait pas voulu savoir, pas voulu comprendre ce qui l’avait poussé à l’abandonner. Doucement, elle se redressa, sautant sur ses pieds, marchant rapidement pour rejoindre son père. Un homme bon, doux mais sévère. Il l’avait bien élevée, elle en était certaine. Souriant doucement, elle claqua une bise sur sa joue avant d’ouvrir le frigo, attrapant une canette de coca pour ensuite faire demi-tour. Pour faire ses devoirs. Elle savait que son père n’y croyait pas trop. Pas avec la musique. Mais, le soir, il la laissait souvent tranquille comme lui aimait l’être après le travail. Mais…elle n’avait pas eu le temps d’ouvrir sa canette qu’un bruit de casse se fit entendre dans la cuisine. Pourtant…il lui avait semblé qu’il était devant la poêle. Fronçant les sourcils. Se redressant à nouveau en moins de temps qu’il ne faut pour dire ouf, elle retourna lentement vers la cuisine. A la fois inquiète. A la fois terrifié. Son cœur battant vite, trop. Quelque chose n’allait pas. Elle le sentait. « Papa ? »

La suite ? Elle n’avait pas trop su ce qu’il s’était passé. Une main avait surgit de nulle part, l’attrapant par les cheveux, son visage heurtant violemment le sol. Un bruit sourd raisonnant dans sa tête, dans ses oreilles. Sonnée, elle n’avait pas compris comment tout était arrivé. Ni, ce qu’il arrivait. Elle voyait à peine son père se débattre. Elle entendait à peine son père crier. Tout flou. Elle voulait se débattre mais, on la tenait férocement. Fort, à lui en faire mal. Fort à l’étouffer, sa poitrine se compressant sur le sol. On allait les tuer ? Un cambrioleur ou…ses yeux s’ouvrirent en grands, son esprit revenant peu à peu, son regard moins flou, croisant les azurs de son père. Il lui avait dit un jour. Ils sont là. Ils sont méchants. Ils nous veulent tous. Doucement, elle dévia ses yeux, remontant sur l’autre personne. Un homme. Homme à l’expression étrange, étrangère. Elle grimaça. Alors c’était à leur tour ? Elle n’avait jamais réellement fait attention à tout ça. Parce qu’elle pensait, elle voulait croire, que tout était faux. Qu’il n’y avait ni envahisseur, ni voleur de corps et pourtant, ce soir, elle en avait la preuve. Parce qu’ils les voulaient eux…à moins que ?

« Pa... » Elle entendit plus qu'elle ne vit le coup que son père porta à l'homme, se battant pour sa vie. Pour leur vie. Elle n'en savait rien. Mais, en voyant son père se débattre, en le voyant combattre, elle se mit à son tour à crier, à bouger. Pour qu'on la lâche. Pour pouvoir aider son père. Pour fuir. Mais, elle n'y arrivait pas. Et pourtant, elle continuait encore et encore. Parce qu'elle ne voulait pas mourir ou pire...se faire...Des larmes se mirent à couler sur ses joues alors que d'un coup, le poids sur son corps s'envola, lui permettant de se redresser rapidement, hagard, l'esprit ailleurs, un peu de sang sur son front. Cherchant son père. « FUIS ! VA T'EN ! » Elle se tourna et hurla, elle se tourna et fit un pas en arrière, elle se tourna et sanglota avant que son corps ne fasse demi-tour, avant qu'elle ne hurle pour appeler son père. Avant que son cœur se brise, le sang coulant, la vie s'envolant. Tout seul son corps se mit en route. Tout seul ses pas se mirent à marcher puis à courir. Tout seul elle fuit. Sans réfléchir, sans savoir où aller. Mais, tout sauf ici. Tout sauf cette ville. Tout sauf cette vie. Elle courrait. Peu importe la pluie, peu importa la douleur, elle devait s'en aller. La triste, la colère envahissant son cœur, son corps.

C'est peut-être de la chance ou du hasard. Mais, elle lui était tombée dessus. Tremblante, le visage en larme, le front en sang, l'œil au beurre noir. Elle s'était excusée. Elle s'était éloignée, mais, une main l'avait attrapé, retenue. Elle avait crié, elle avait voulu fuir puis...elle s'était mise à regarder autour d'elle. Etonnée, perdue. Elle avait couru, longtemps, durement, à se tuer, à s'essouffler. Son cœur battant sans repos dans sa poitrine, pour que son corps fonctionne correctement. Elle était quasiment à la sortie de la ville. Un garçon, non, un homme lui tenant le poignet. Elle voulait se réveiller. Que ce passait-il ? Qu'arrivait-il ? L'homme l'avait fixé, lui avait demandé ce qu'il se passait. Et bizarrement, sa garde baissée, trop fatiguée, elle avait tout dit, tout pleuré. Et...elle avait eu raison, car, il l'avait tiré. Car, il l'avait emmené loin de cette ville. Loin de cette merde. Mais, dans une autre folie. Une folie qu'elle ne comprenait pas encore. Une folie qu'elle allait apprendre à aimer et à vivre pour. Parce qu'elle avait cette petite part de courage. Parce qu'elle était têtue. Parce qu'elle voulait vivre.

Elle regardait autour d’elle, émerveillé, car, c’était magnifique, mais inquiète. Monde hostile, nouvelle vie. Son regard se tourna vers l’arrière, regardant la grotte qui s’étendait loin dans l’ombre. Là où elle vivait, là où elle devait apprendre à résister, à combattre. Parce qu’elle ne voulait pas être un fardeau. On lui avait tout expliqué. Elle avait choisi de les suivre. Parce que…Ce qu’il s’était passé cette nuit-là… plus jamais. Elle frissonna doucement et, se détourna. Pour rentrer. Pour retrouver sa nouvelle maison. Sa nouvelle famille. Sa nouvelle vie.