Deux petites souris tombent dans un seau de crème. La première souris abandonne très vite et se noie, la deuxième se débat tellement fort qu’elle change la crème en beurre. À partir de maintenant je suis cette deuxième souris.

L'air lointain, abîmé de songes, Cosmo savourait une dernière fois la chaleur des derniers faisceaux rutilants. Tandis qu'un cercle orangé s'échouait à l'horizon derrière quelques flancs de colline, l'obscurité fut bientôt seule pour tourmenter ces pauvres diables qui, tapis dans l'ombre du clair-obscur, sillonnaient à travers les sentiers périlleux pour chasser. Chicago s'endormit lentement sous le regard attentif du manteau étoilé qui s'était formé dans le ciel. A première vue, la ville semblait dénuée de promeneurs importuns. Le calme siégeait comme maître dans l'enceinte de Chicago. A l'abri des regards, dissimulé par quelques broussailles au niveau de la périphérie, l'ex-marine détaillait d'un regard minutieux les ruelles désertes, tout du moins lui semblait-t-il. Dans le silence ambiant et le crépuscule engloutissant, « ils » rôdaient, flânant tels des fantômes dans les ombres dansantes sur les murs et les trottoirs. A l'heure actuelle, Chicago n'avait plus rien de rassurant pour un homme comme lui, un rebelle. Ce n'était pas la première fois qu'il se rendait dans cette agglomération populaire, et ce n'était sans doute pas la dernière fois qu'il se ferait pincé par une âme malveillante. Il avala une grande bouffée d'air avant de se montrer plus entreprenant. L'excitation et l'angoisse étaient à leur apogée. Fébrile, Cosmo s'effaça dans le décor urbain et gagna le quartier résidentiel, déambulant à travers les venelles les plus étroites. La discrétion était la seule maîtresse des lieux. Son cœur tambourina dans sa poitrine alors qu'il crut entendre quelques bruissements étranges derrière lui. Un coup d'œil lui enleva tout soupçon. Pourtant, un malaise subsistait. Rien d'étonnant pour un humain dans une ville peuplée de lardons. Il caressa d'un regard intéressé une maison qui respirait un certain luxe. Il devait se charger de ramener de la nourriture et d'autres produits pour la grotte. Plus facile à dire qu'à faire, mais notre jeune coquin était toujours le premier à offrir ses services pour ces expéditions scabreuses. Après quelques œillades pointilleuses, le beau diable s'insinua dans le foyer en s'offrant un passage par la fenêtre du sous-sol. C'était une minuscule cloison qui n'avait rien d'entreprenant. Cosmo dut serrer les fesses pour se frayer un passage. Quelques jurons étouffés ne franchirent jamais la barrière de ses lèvres. Inutile d'éveiller l'attention des lardons. D'un pas volatile il gravit les quelques marches qui le séparaient du rez-de-chaussée. L'espace d'une seconde il s'arrêta net, aux aguets. Sa respiration sifflante et son rythme cardiaque sporadique furent les seuls bruits qui l'alertèrent. Dans sa main droite, un poignard russe était fermement enlacé par ses doigts rugueux. Ses pas l'amenèrent rapidement dans la cuisine où il se perdit dans l'alcôve glaciale du réfrigérateur pour remplir ses deux sacs. Il s'arrêta également devant quelques armoires où biscuits et autres saveurs impérissables logeaient. Soudain, quelque chose le paralysa dans son ambition. Étaient-ce des bruits de pas juste à l'instant? Dans tous les cas, un frémissement suspicieux avait déclenché le signal d'alarme. Cosmo patienta dans l'espoir que son imagination seule lui jouait des tours. Une perle salée glissa sur l'arabesque de sa joue jusqu'à l'angle de sa mâchoire pour s'échouer au sol.

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What will be the worse ? Live as a monster, or die as a good men ?

Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas attrapé un humain. Elle n'avait aucune cible précise, et la hiérarchie se plaignait du manque de résultat de ses traqueurs. Il restait si peu d'humains que les Âmes avaient cru pouvoir les assouvir en un rien de temps. La réalité était toute autre. Maintenant que les résistants connaissaient mieux les Âmes et leur mode de fonctionnement, il était difficile de les attraper. Ils se montraient malins, ingénieux, et pire encore : ils n'hésitaient pas à devenir violents. Les Âmes, de nature plutôt douce et prudente, avaient tendance à se méfier, et à partir en mission moins volontairement. Ce n'était pas le cas de Madison. Elle avait toujours en elle cette détermination à toute épreuve, qui la poussait à ne pas cesser le combat, à toujours aller de l'avant pour les traquer jusqu'au dernier.

Ce soir là, elle s'était planquée en embuscade dans la maison de deux Âmes qu'elle connaissait bien : Petit-Espoir et Lune-De-Jour. Ils étaient absents pour une semaine, et c'était l'occasion rêvée. Les résistants guettaient souvent les maisons vides, et s'y engouffraient pour ravitailler leur stock. Son plan s'annonçait donc plutôt bien. Tout ce qu'elle avait à faire, c'était se planquer dans un coin, et attendre qu'un humain tombe dans la gueule du loup. C'est exactement ce qui se produisit à la tombée de la nuit. Elle entendit d'abord du bruit au sous-sol. Pensant à un chat, elle resta néanmoins sur ses gardes, prête à bondir. Finalement, les pas montant les escaliers lui indiquèrent qu'il s'agissait bien de quelqu'un qui était rentré à l'intérieur. Elle se leva sans faire un bruit, son arme entre ses mains pointée vers le sol. Elle plaqua son corps sur un pan de mur. De là, elle pouvait apercevoir le frigo. Elle était persuadée que c'était ici que l'humain se rendrait. La nourriture était ce qui leur manquait le plus, ils ne venaient pas pour voler des objets de valeur. Elle l'aperçut alors. C'était un homme. Grand, imposant, il avait une carrure impressionnant, et Madison se demanda l'espace d'une seconde si elle arriverait à le maîtriser seule. Elle préféra chasser ses interrogations. Hors de question de rentrer bredouille un soir de plus. Les humains devaient être traqués, point. L'homme remplit soigneusement deux sacs, et elle l'observa faire, attendant propice où elle pourra jaillir. Elle s'avança un peu pour mieux le voir, mais également pour se préparer à bondir. Le parquet craqua, trahissant sa présence, et l'homme releva la tête. Il avait entendu. Elle n'avait donc plus une seconde à perdre. Elle bondit hors de l'ombre sur l'homme, et le plaqua de tout son poids contre le mur le plus proche. Son physique fluet jouait en sa défaveur, mais elle avait l'effet de surprise. Elle frappa le poignet de l'humain avec son revolver, lui faisant lâcher son couteau au sol. Son avant-bras fermement plaqué contre sa gorge, elle le regarda droit dans les yeux, essayant de discerner si une âme vivait à l'intérieur de ce corps, bien qu'elle en doutait fortement.

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