Long time no see...

Les lundi, les humains les détestaient, parce que cela signifiait le retour au travail. C'est étrange de détester son Emploi, pourquoi ne changeaient-ils pas? Pour une âme, c'est important d'avoir un Emploi, car cela permet de redonner aux autres ce qu'ils nous donne, puisque nous, nous ne payons rien. Tout cela pour dire que c'est lundi, et je quitte après ma journée au centre de soin, il est 16 heures. Malgré que mon esprit soit complètement éveillé, je sens que mon corps est fatigué. Edelweiss n'était pas des plus en forme, ce qui est surprenant pour ce jeune âge, et malgré mes deux ans avec elle, ce corps n'est pas totalement habitué aux réveils matinaux et aux longues journées de travail.

Vu le beau temps et la douce température, je fais un petit saut au Starbuck pour me prendre une boisson froide et caféinée. C'est un petit péché mignon, ce n'est pas exactement dans mes habitudes alimentaires, me je me suis fait à l'idée que mon hôte adorait ce genre d'aliments sucrés. En quittant l'endroit je reçoit une pluie de sourires, des âmes qui me sont inconnues, et d'autres, comme la serveuse, qui commencent à me reconnaître. Je leur renvoie à tous un sourire radieux tout en faisant un signe de la main en signe d'au revoir. Je prend maintenant la route vers mon appartement, qui est à plusieurs rues de là où je me trouve. Mes sandales à talons me font un peu souffrir, je ne suis pas habituée d'être chaussée ainsi mais je trouve que cela me fait de plus belles jambes et me grandit. À cette pensée j'eût un léger remord, jamais avant je ne m'étais préoccupée de mon corps, ou plutôt celui de mon hôte. Mais les humains avaient des moeurs très poussées vers l'apparence, ce qui m'influence un peu je dois l'avouer, mais c'est aussi parce qu'ils sont très beaux, et on a envie d'en prendre soin. Dans la même ligne de pensée, j'évitais au mieux les quelques flaques d'eaux qui parsemaient les rues, créées par les pluies des jours précédents, afin d'éviter de tacher ma robe d'été qui était d'une couleur saumon très pâle.

En chemin, elle rencontra une collègue qui allait justement faire son quart au centre de soins. Son nom était Étincelle-de-soleil, et elle venait de la planète du feu. Elle m'a un peu parlé de ce lieu, et je suis à peu près certaine que je ne l'aimerais pas... En fait, je dois avouer que j'adore toutes les possibilités qu'apporte la Terre, et malgré que j'ai adoré la planète des fleurs, je crois bien rester ici encore quelques vies, surtout que la durée de vie des hôtes est tellement courte qu'on peut à peine en profiter!

Nous discutions donc de choses et d'autres, lorsque mon attention à été détournée. Un visage. Normalement les gens vont et viennent auprès de moi sans que je les remarque vraiment, tout le monde a l'air si gentil qu'on passe à peu près tous inaperçus. Mais ce visage là m'a attiré immédiatement, pas seulement parce qu'il était beau, mais aussi parce que je le connaissais ! J'interrompis mon interlocutrice au beau milieu d'une phrase pour me diriger vers cet homme.

Long time no see...

J'avançais d'un pas ferme, malgré que dans ma tête mes méninges se bousculaient un peu. Lorsque je l'ai aperçu, ça m'a donné un grand choc, et j'ignorais pourquoi. Quelques pas plus loin, cette impression de le connaître s'était dissipée un peu. Pourquoi mon corps avait-il réagit si violemment ? J'ai alors ressassé les souvenirs de mon hôte, et cela m'a pris un certain temps avant de découvrir qui il était. Edelweiss ne l'avait pas vu souvent, c'était le meilleur ami de son amoureux, mais à ce que j'ai pu comprendre il avait toujours résidé à Chicago, ce qui expliquait pourquoi elle n'avait pas beaucoup de souvenirs de lui. Et j'ai même eu la vague impression qu'Aidan tentait de l'en éloigner, car malgré qu'elle et lui se connaissaient peu, ils s'entendaient très bien.

Puis, alors que je m'approchais de plus en plus de lui - et que je me rendit compte qu'il me regardait - je m'interrogeais. Jamais je n'avais rencontré de personnes qu'Edel avait connues, autres que les parents d'Edelweiss, sous forme d'âme. Vu le peu de rencontres qu'ils avaient eu sous forme humaine, cet homme avait-il eu la même réaction que moi en apercevant mon visage ? Était-il ouvert à une discussion avec une personne qui provenait d'un souvenir ? De plus, je ne savais pas trop à quoi m'attendre de l'issue de notre conversation à venir, car je suis très différente de mon hôte, et il le serait sûrement aussi. Bien que généralement toutes les âmes s'entendent bien entre elles, je ne devais pas m'attendre à un lien de complicité autant que ce que mon souvenir m'évoquait.

C'est alors que je me demandais ce que je devrais dire. Plus que quelques pas et je serais près de lui, je ne pouvais plus me défiler. Je n'avais aucune idée de comment entamer la conversation, je ne me voyais pas trop dire un truc du genre : « hey, mon hôte et ton hôte se connaissaient, soyons amis » ?. Ce genre de formulation était même un peu trop humaine à mon goût. Puis, la chose à laquelle je n'avais pas encore songé et qui était pourtant si évidente me frappa : avait-il eu des nouvelles d'Aidan ? Ils étaient meilleurs amis et il vivait à Chicago depuis le début de l'invasion, peut-être s'étaient-ils rencontrés encore humains, ou même sous forme d'âmes ? Savoir qu'Aidan puisse être une âme me soulagerait d'un poids puisqu'il serait facile à trouver, mais en même temps ça me briserait le coeur, serait-il encore le même ? Probablement que non, pas plus que moi.

Cet élan de questions et qu'inquiétudes s'était passée en quelques secondes, mais ça me parut de longues minutes. J'étais désormais devant lui, il était trop tard pour changer de direction. Heureusement pour moi, il engagea la discussion, ce qui était bien puisque je n'avais toujours pas trouvé quoi dire...

Il me sourit, sourire que je lui rendis tout naturellement. « Bonjour, belle journée, n'est-ce pas? » . J'ai hoché nerveusement de la tête, et baissé les yeux. « Oui ». J'observai mes pieds quelques secondes avant de replonger mon regard dans le sien, et souri de nouveau. « Je... ». Il y avait de l'hésitation dans ma voix, j'avais peur d'être trop abrupte en parlant tout de suite de mon souvenir humain. « Je vous ai remarqué tout de suite. Je ne suis pas sûre à cent pour cent, mais... ». Bien sûr, que j'en suis sûre à cent pour cent, idiote! « Mais j'ai cru vous reconnaître dans les souvenirs de mon hôte, elle s'appelait Edelweiss. Vous êtes - ou plutôt étiez - Ash, n'est-ce pas? ».